Pippa - Wicked Games -

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Cette journée avait mal commencé. Il y avait des matins comme ça, pensa-t'elle au début. Cela ne pouvait pas être pire, résonnait inlassablement dans sa tête, telle une prière. Pourtant, tout allait de travers. Elle avait passé une "nuit" horrible, sans cesse réveillée par les miaulements tonitruants du chat d'une voisine, dont elle avait dû voler la voix à coup de sortilège. Seulement ce matin, le matou avait disparu. Après avoir passé des heures à gratter contre la fenêtre, il avait fallu qu'il disparaisse avant qu'elle ai pu annuler son sort. Bravo. Bien joué. Ses parents seraient ravis d'apprendre qu'elle avait ensorcelé le chat d'une moldu. Comme ils seraient enchantés d'apprendre que leur cadette était allé faire la fête avec ses camarades de Quidditch, dans un cabaret moldu, jusqu'à une heure avancée de la nuit. Voire du matin. Elle ne savait plus. Beaucoup de moldus pour une si courte période. Mais comme Lucy, attrapeuse de l'équipe des Holyhead Harpies, disait si bien : " Les moldus savent bien mieux s'amuser que les sorciers. Ils arrivent à faire des choses incroyables avec si peu de moyens. C'est tellement mignon. " Pippa devait le reconnaître, sa coéquipière n'avait pas tord. Mais Lucy était une sang-mêlée et pouvait se permettre d'affirmer de tels propos. Elle, de son côté, se devait de faire attention. Encore plus depuis que sa famille soutenait ouvertement Grindelwald.

La sorcière, du haut de ses vingt ans, ne savait plus vraiment comment se positionner. Avait-elle vraiment besoin de choisir un camp ? Après tout, elle n'était qu'une femme, vouée à se marier par obligation et à enfanter de parfaits petits sang-purs. Personne ne lui demanderait jamais son avis. Et le fait qu'elle soit sorcière ne changeait pas beaucoup du statut des femmes moldus, de ce qu'elle avait pu en voir.

Pippa s'était échappée de chez son amie après jeté un coup d'oeil à l'heure. Quatorze heure passé. Qu'allait-elle bien pouvoir inventer comme mensonge ? Sachant que son paternel avait le don de toujours, toujours savoir quand elle mentait.
Alors qu'un soleil d'été brillait, Pippa dévalait la rue à la recherche d'un peu d'ombre. Cachée sous un large chapeau, sa silhouette camouflée par un long manteau, la jeune femme avait du mal à se remettre de sa soirée. Il lui faudrait demander à sa mère un sortilège pour effacer un puissant mal de crâne. Mais pour l'instant, le chemin menant à la maison Lestrange se révélait être un vrai calvaire. Un soldat anglais lui avait expliqué ce que "parcours du combattant" signifiait, en plus d'avoir évoqué quelques horreurs de la guerre. L'expression devait parfaitement se prêter à ce qu'elle vivait actuellement. D'ailleurs, ce bougre n'avait-il pas terminé dans la chambre de Lucy ? Décidément, la jeune sorcière enviait la liberté de sa camarade.

Elle arriva finalement dans la rue ou logeait sa famille depuis plusieurs générations. La jeune sorcière ne prêta pas attention à l'animation qui régnait. Le bruit était caractéristique de cet endroit, entouré d'une école et d'un marché. Mais quand elle prit le petit angle qui devait la mener à la discrète porte d'entrée, la foule de robes vertes lui firent lever les yeux.  Elle se fit pousser brutalement par l'un des guérisseurs alors que des voix résonnaient à l'intérieur du bâtiment. Le coeur de la jeune femme s’emballa et elle se précipita dans le couloir. L'emblème de l'Hôpital Sainte Mangouste ornait la robe de tous les sorciers qui se pressaient vers la cuisine. Elle vit son frère, prostré dans un coin, des mains ensanglantées cachaient son visage. Pippa s'approcha doucement et murmura " Que s'est-il passé, tu es blessé ? ", tout en sachant que cela ne le concernait pas. Les robes vertes ne leur prêtaient aucune attention. " C'est papa..." begayat le jeune homme, paraissant beaucoup plus frêle que d'habitude. La sorcière essaya de jeter un oeil en direction de la cuisine " Papa ?! Qu'est-ce qu'il a fait ? ". La situation n'avait aucun sens. Aldarik Lestrange était un roc, un sorcier suffisamment puissant pour être respecté par ses semblables. Qui aurait bien pu lui vouloir du mal ? Et surtout, qui aurait réussi à le blesser... " Ils se sont disputés et ... Il a ... Il a tué maman. " lâcha le jeune homme entre deux sanglots. La sensation qu'un mur vient de lui tomber sur la tête, que ses deux jambes se brisent sous son poids. Pippa s'éloigna de son frère en titubant, se faisant bousculer par les guérisseurs. Elle devina à peine la silhouette de sa mère entre deux sorciers qui s'apprêtaient à lancer un sortilège pour mieux transporter le corps. Sans vie. Lacéré, comme si un dragon en avait fait son jouet favoris. Son regard balaya la petite pièce, à la recherche du fautif. Mais du père, il ne restait aucune trace. Elle souhaita que sa mère l'ait fait définitivement disparaître. Cela lui éviterait d'avoir à le faire elle-même. Et puis, elle vit une énorme hache joncher le sol. Couverte de sang, tranchante. Une hache moldue  que son père avait négociée des années auparavant. Son goût pour les armes de ce genre avait toujours effrayé le reste de sa famille. Mais Aldarik faisait passer ça pour une lubie, une petite passion passagère. Comme l'époque où il collectionnait les cadavre de nourrissons déformés dans des fioles transparentes.

De grosses larmes coulaient le long de ses joues. Pippa se mit à pleurer comme une enfant en essayant de se rappeler le visage de sa mère. Jehanne n'avait jamais été très aimante, mais toujours juste. La cruauté et le dédain de son mari l'avait poussé à l'assassiner, sans même utiliser la magie. Lui qui la considérait comme une piètre sorcière lui avait donné une terrible leçon.
Pippa ne saisissait même plus les mots que lui adressaient les guérisseurs. De toute façon, il n'y avait rien d'autre à comprendre. Pourtant, une main se posa sur son épaule et la fit sursauter. " Vous devriez parler à votre père. " susurra un homme au regard émeraude. Son visage lui rappelait vaguement quelque chose, mais un pic de colère lui troubla la vue. En l'espace de quelques secondes, elle s'était persuadée que son père avait disparu. Qu'il avait prit la fuite, ou mieux, que Jehanne l'aurait changé en poussière.
Ainsi donc, il était vivant. Et pour couronner le tout, un pauvre imbécile lui conseillait de parler à ce meurtrier. Comme si tout était normal. " C'est un terrible accident. " insista l'homme en vert. C'en était trop. "Un accident ? Tuer sa femme à coup de hache, ça ressemble à un accident d'après vous ? " vociféra Pippa. Quelques regards s'étaient brièvement tournés vers elle, le temps de hausser les sourcils." S'il avait voulu la tuer, ne pensez-vous pas qu'un sorcier de sa trempe l'aurait achevée d'un coup de baguette ? " rétorqua le sorcier, une expression de dégoût accrochée à sa face de serpent. La jeune femme se renfrogna, se tourna vers les escaliers qui menaient aux chambres et resta figée.