il feint la joie, un soupir le dément (PIOTR)

"Parlez-nous un peu de vous. Si vous deviez vous décrire en quelques mots que diriez-vous ?" Jadis séide aux volontés de sa regrettée reine, féal à ses caprices, l’illustre homme a toujours été de paroles parcimonieuses. Semblable à ces effigies marmoréennes, d'apparence aussi froide et occulte que le frimas, il est devenu impitoyable et autoritaire depuis le décès de la matriarche. Le Bulgare n'est plus mortel à faire artifice de ses joies, de ses peines et de ses affres comme il nie ses chagrins et sème l'hiver en son cœur. Intransigeant et rigoureux là où on le croirait abattu et accablé, le paternel est habité d’une force insoupçonnée nonobstant la maladie qui l’éraille. D’orgueil, Piotr en est horriblement nippé, de sorte que nul ne sait exactement ce qui se terre sous le roc de son enveloppe, et peu cherchent véritablement à le désaper, le tenant bien trop en respect pour daigner violer son intimité. Si, du temps où il avait cœur et genou en terre pour sa muse, des bonheurs et des passions fugaces venaient se nidifier sur le pli de ses lippes, son visage s’est transformé aujourd’hui en une roche taciturne, fendillée quelquefois par des folies auxquelles on accuse sa dépendance à l’opium, fragmentée qui plus est par le magma d’un volcan qui dormait naguère. Plusieurs susurrent qu’il n’a plus la lucidité et la santé nécessaires pour siéger aux flancs du vénérable Grindelwald, Piotr leur prouve le contraire, immuable malgré les faiblesses de l'esprit, les hurlements du cœur et obstiné au possible. Ranci par les arias de son existence, il se sent débouler sur la déclivité de la vie, direction son caveau, emportant dans son sillage les navrantes esquilles de l'empire Vulchanov.

autoritaire ; froid ; sanguin ; intransigeant ; impitoyable ; taciturne ; mélancolique ; lunatique ; féal ; borné ; nihiliste ; effrayé ; déséquilibré ; orgueilleux

"Grindelwald domine l'Angleterre et la Bulgarie depuis 6 ans en quoi cela-t-il influé sur votre quotidien ?" L’on reconnait irréfutablement aux Vulchanov leur remarquable ascension parmi les familles de sang-pur les plus notables. Si leur monopole sur le trafic de substances capiteuses, en particulier l’opium, a été germe à leurs incroyables richesse et renom, il a aussi été carburant à moult tracas judiciaires en raison de l'illégalité de leurs activités. À l'apogée de Grindelwald, aux prémices de son apothéose, fut l'idée de la matriarche de placer les Vulchanov sur le sillage du maître en devenir, conseillant à Piotr de se creuser une place de choix pour s'assurer d'un avenir brillant. Les idéaux de leur nouveau chef comme prétexte afin de prendre la tangente, ils ont fui pour Londres. La précocité de cette alliance a valu au padre le titre de bras droit, rang dont il s'enorgueillit ostentatoirement et qu'il ne compte aucunement abandonner, ce malgré les précédents aléas essuyés.

"Vous voyez un passant dans la rue se faire malmener par deux spaseni, serviteurs de grindelwald, que faites-vous ?" Pour chaque quidam, sa juste place. Piotr n’est pas homme à perdre son temps, encore moins à s’abaisser à ces futilités. C’est en silence qu’il abhorre les faibles et les démunis. Regard revolver à l’encontre de cette sous-plèbe, mépris pour tout organisme que le sang-pur n’irrigue pas, le patriarche, inflexible, n’accorde pour ainsi dire aucune attention et ne dilapide encore moins son énergie pour cette populace. Juché du haut d’un piédestal qu’il s’est bâti via sueur et labeur, il exècre ces cancrelats, rampant dans la fange et se nourrissant à la moelle d’un monde dont ils ne sont guère les bienvenus. Qu’ils périssent tous, pensera le patriarche en guignant le bouc-émissaire de ces deux spaseni.

« Vous voila devant le miroir du Riséd, que pensez-vous y voir ? » Une vénusté et son rejeton, exhumés de la glèbe, redonnés à la vie. On ravaude la famille Vulchanov en y greffant les deux figures qu’on leur a impunément arrachées. Voilà, le tableau est complet, les visages, heureux ; la gloire dont se nimbait autrefois le patronyme renaitrait fissa avec la matriarche et le jumeau si seulement il s’agissait plus du reflet d’un désir utopique. Cette réalité est propriété du passé...

« Par chance, vous vous trouvez en présence des trois reliques de la mort, mais vous ne pouvez en choisir qu’une. Laquelle prendriez-vous ? » Donnez à cet esprit trouble la baguette de la destinée, qu’en fera-t-il réellement ? L’homme n’est pas gourmand de pouvoir, peu ambitieux ; fidèle, certes, au maitre Grindelwald, mais pas assez déterminé pour brandir la relique en son nom et sa volonté. Il a un peu la vindicte au bord du cœur, mais la méconnaissance de ses assassins floute les cibles et le cantonne à l’inertie. Alors le Vulchanov, les doigts noués autour de ce sacro-saint vestige, n’honorera certainement pas la puissance de cette baguette, pas plus qu’il ne la brandira pour redorer l’oriflamme familial. Non, il patientera, la Mort en main, qu’une occasion se présente ; qu’un meurtrier se dévoile. Et là, l’instrument de la Camarde changera enfin le vieux Piotr en un redoutable bourreau assoiffé de justice.