hermes + pourquoi tu programmes ton abîme

"Parlez-nous un peu de vous. Si vous deviez vous décrire en quelques mots que diriez-vous ?"
Il y a quelque chose de tordu, chez Hermès, quelque chose qui ne marche pas droit, quelque chose qui ne tourne pas rond, une sorte d'étrangeté, d'indélicatesse, masquée derrière l'aristocratie de ses traits. Il y a une sauvagerie, un calcul, une déficience, un manque, quelque chose de terrible caché dans ses sourires, des secrets qu'il ne peut pas dire, une détermination dirigée vers quelque chose d'infâme et de fameux, d'étrange, de sombre. Hermès est un Travers. Ça ne se voit pas sur son visage, ça n'est pas écrit sur ses traits. Hermès est un Travers. Ça se dessine sous ses manières, sous son port de tête aristocratique, sous les intonations dans sa voix. Il y a quelque chose de grand, dans son corps, quelque chose d'ambitieux, une once du dieu dont il porte le nom, dieu des voleurs, des voyageurs, dieu des menteurs. Hermès sourit, et c'est tout un plan de bataille, Hermès sourit et il sait exactement quel angle faire adopter à ce sourire, à qui le destiner, quel effet il va procurer, Hermès sourit et tisse des alliances, sait positionner son corps, sait user de ses mains autant que de sa langue. Il aimerait dire qu'il est tout en contrôle, Hermès. C'est vrai, d'une certaine façon, il contrôle beaucoup de choses, ses émotions, ses expressions, sa voix, ses pensées. C'est vrai, d'une certaine façon, parce qu'il a une emprise sur ce qu'il est, sur ce qu'il fait, sur ce qu'il pousse les autres à faire. C'est faux, d'un autre côté. C'est faux parce qu'il y a quelque chose qui boue en lui, quelque chose de sauvage et d'animal, quelque chose qui pulse, qui appelle le sang, qui appelle la destruction, quelque chose qui s'appelle Dame Colère et qu'il embrasse la nuit lorsqu'il déchire ce qu'il crée, lorsqu'il cogne dans les murs comme un animal en cage parce qu'il sait qui il est, parce qu'il sait ce qu'il doit faire, parce qu'il connaît ses serments mais qu'il ne supporte pas de se sentir piégé, qu'il honnit le fait de s'être fait attraper, d'avoir été saisi. Parce que Tom Jedusor est un ami, un maître, un autel en attente de dévotion et qu'il est le dieu qui s'est fait attacher sans s'en apercevoir. Une fois de trop, il n'a pas été le maître de son échiquier.

Il ne sait pas s'il regrette. Probablement que non, parce qu'Hermès vit sans regret, parce qu'Hermès refuse de s'attarder, parce qu'il est résolu et résigné, qu'il sait que certains choix ne peuvent être modifiés, qu'il sait que ses prochaines actions détermineront son futur, que les choix qu'il a fait peuvent être altérer, transformé en des réussites plutôt que des échecs, qu'il sait qu'il en a les capacités. Hermès a une foi dérangeante en lui-même. Hermès connaît ses forces, reconnaît ses faiblesses, fait le tri, se réconforte lui-même. Il n'a jamais pu compter que sur sa propre personne, de toute façon, parce que sa sœur est une étrangère, parce que leur père est un homme qu'il n'a jamais aimé. A-t-il jamais aimé qui que ce soit, de toute façon ? Il n'en sait rien, ne veut pas savoir : l'affection est une faiblesse, les sentiments sont une faiblesse, les gens feraient n'importe quoi par peur, par colère, par envie, et il ne veut pas être de ceux-là, lutte contre son impulsivité, bataille contre les mots qui rampent dans sa gorge, ceux qui sont spontanés, ceux qu'il n'a pas mâchés, digérés, reformulés. Les émotifs s'écorchent le cœur sur les pics de leurs propres sentiments.

Pendant ce temps, Hermès lit.

"Grindelwald domine l'Angleterre et la Bulgarie depuis 6 ans en quoi cela-t-il influé sur votre quotidien ?"
La vérité c'est que ça n'a rien changé. Hermès est un Travers et les Travers savent toujours comment se placer, comment s'en tirer, comment garder la tête haute. Grindelwald ou un autre importe peu : les Travers ont toujours de la chance, en ont toujours eu, parce que c'est comme ça, comme une bénédiction, une infusion de Felix Felicis dans le sang, ils tirent toujours la plus longue paille, ne se retrouvent jamais le bec dans l'eau. Le secret, c'est d'être toujours du côté du gagnant, d'avoir toujours un coup d'avance sur les mouvements du reste du monde, pour être au bon endroit, au bon moment, pour parvenir à se hisser jusqu'au sommet. C'est l'important, ça, le sommet, et même Grindelwald et ses délires de domination du monde ne l'empêcheront pas d'y parvenir. Bien sûr, il y a eu l'opprobre, les ricanements des autres sangs purs devant la neutralité de leur famille, bien sûr, il y avait eu leur silence, leur manque de déclaration, leur manque d'engagement, bien sûr, ça a eu un impact, parce que leur famille a été relégué dans les tréfonds de la pureté, parce qu'on a commencé à chuchoter à propos de leur lâché mais c'est sans importance : Hermès, comme le reste de sa famille, attend son heure, un tatouage sur le bras et la sérénité dans l'âme.

"Vous voyez un passant dans la rue se faire malmener par deux spaseni, serviteurs de grindelwald, que faites-vous ?"
Si Hermès était un Gryffondor, peut-être enroberait-il la vérité, peut-être ferait-il passer cela pour quelque chose de droit, quelque chose de juste, quelque chose de moral. La vérité, la réalité, dépouillée de toute hypocrisie c'est qu'Hermès ne ferait rien. Hermès fixerait, Hermès hausserait les épaules, Hermès passerait son chemin. Hermès n'a pas de temps à perdre avec ces conneries, pas de temps à perdre avec quelque chose qui pourrait lui coûter. Il n'est pas intègre, Hermès, pas auror pour faire le bien, pas auror pour rendre justice. Il est auror parce qu'il peut apprendre des choses sur les gens, il est auror parce que ça lui permet de compulser des dossiers auquel il n'aurait jamais eu accès sinon, il est auror parce que ça lui permet de remplir ses petits carnets remplis d'informations qui pourraient faire sombrer les puissants. Alors oui, il fermera les yeux. Alors oui, il contournera les spaseni, détournera les yeux, passera son chemin. Parfois, l'inaction est encore plus parlante que les mots.

« Vous voila devant le miroir du Riséd, que pensez-vous y voir ? »
Hermès ne sait pas. C'est une faiblesse que de désirer quelque chose, une faiblesse terrible et Hermès refuse d'être faible. S'il doit se laisser aller à rêver, peut-être admettra-t-il qu'il y a des choses qu'il veut, peut-être avouera-t-il qu'il y a une silhouette à ses côtés, une silhouette sans sexe ni visage mais une silhouette quand même et la mer à perte de vue, la mer calme et plate, la mer sans houle et sans vague, une étendue bleue et immense et une main dans la sienne et le sel dans sa bouche, le vent dans ses cheveux. Peut-être dira-t-il qu'il est moins propre sur lui, moins bien habillé, moins droit, moins raide, plus esclave de ses passions que maître de ses émotions. Si vous êtes chanceux, peut-être, peut-être, chuchotera-t-il qu'il est heureux, qu'il a l'air heureux, qu'il paraît heureux, même si ça lui écorche la bouche de le dire, même si ça le tue de penser qu'il n'est pas heureux à l'heure qu'il est.

« Par chance, vous vous trouvez en présence des trois reliques de la mort, mais vous ne pouvez en choisir qu’une. Laquelle prendriez-vous ? »
Si on lui posait la question directement, il répondrait « La baguette de sureau » parce que c'est la puissance, parce que c'est ce qu'on attend de lui, parce que c'est l'image qu'il cherche à renvoyer. La réalité, c'est qu'il choisirait la cape. C'est plus utile, l'invisibilité, plus traître, aussi, ça permet de se glisser, de se faufiler, de passer inaperçu, d'échapper aux surveillances, ça permet de tromper, de mentir, de détourner l'attention, ça permet de fuir aussi, de fuir ce qu'il est, de fuir qui il est, de fuir la mort qui rôde. Ça permet de s'échapper. Mais Hermès est un Travers et les Travers ne s'échappent pas alors sa vérité restera scellée, enfermée dans une bouche qui refusera d'avouer.